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Association "1846"

La fortification du XIXe siècle : connaître et partager

Postes de torpilles du goulet de Brest

Postes de torpilles du goulet de Brest
© Géoportail© Géoportail

© Géoportail

Au milieu du XIXe siècle, les avancées technologiques de la Révolution industrielle permettent d'envisager d'autres moyens que l'artillerie pour la défense des côtes. Parmi ceux-ci, les ancêtres des mines sous-marines modernes, appelés « torpilles ».

Les torpilles utilisent des techniques de mise a feu assez variées (mécanique, chimique, électrique, etc.), peuvent être posées sur le fond ou flotter entre deux eaux, mais le principe général reste le même : amener une charge explosive à se déclencher au passage d'un navire. Les premiers emplois réels ont lieu durant la guerre de Crimée (1853-1856). Les Confédérés en font un usage massif durant la guerre de Sécession (1861-1865) pour défendre leurs côtes contre la puissante flotte de l'Union. Il existe aussi des « torpilles portées » mise en œuvre à partir de petites embarcations munies de longues hampes portant la charge – les premiers torpilleurs – , et bientôt des « torpilles automobiles », c'est-à-dire ce que nous appelons aujourd'hui torpilles tout court.

Schéma de la ligne de torpilles du goulet de Brest entre la batterie de Cornouaille et la roche Mengant

Schéma de la ligne de torpilles du goulet de Brest entre la batterie de Cornouaille et la roche Mengant

En France, on commence à étudier leur emploi dans la défense des côtes au cours des années 1860. Les barrages de torpilles sont très adaptés à l’interdiction des passes étroites menant aux rades des ports. De tels dispositifs entrent donc dans la défense des ports de Cherbourg, Lorient, Rochefort et Toulon à partir des années 1870. Brest est également concerné par des projets d'installation de « défenses sous-marines » à la fin des années 1860 et au début des années 1870. Mais malgré les apparences le goulet se prête mal à l'usage des torpilles : trop de profondeur, fonds rocheux, trop de courant, trop de houle. Il n'y a que dans la passe sud, au niveau de la roche Mengant, qu'il est possible de prévoir un barrage simple de torpilles « dormantes », posées sur le fond et déclenchées à distance. Il convient de préciser que ce barrage constitué de 45 engins d'abord en fonte puis en tôle (à partir de 1882, au nombre de 31) remplis d'explosif (poudre noire puis fulmicoton à partir de 1882) ne doit être installé qu'en cas de guerre. Les seules installations permanentes sont les deux observatoires, construits en 1878 dans la presqu'île de Roscanvel à la pointe de Cornouaille et entre celle-ci et le fort Robert. Ils subsistent de nos jours.

Vue actuelle du poste extérieur recouvert de béton et évocation de l'aspect originel du bâtiment (le poste de veille n'est pas détaillé)Vue actuelle du poste extérieur recouvert de béton et évocation de l'aspect originel du bâtiment (le poste de veille n'est pas détaillé)

Vue actuelle du poste extérieur recouvert de béton et évocation de l'aspect originel du bâtiment (le poste de veille n'est pas détaillé)

Vue intérieure du même poste et détail du sabord de visée qui a gardé ses voletsVue intérieure du même poste et détail du sabord de visée qui a gardé ses volets

Vue intérieure du même poste et détail du sabord de visée qui a gardé ses volets

Pourquoi deux observatoires pour une ligne de torpilles ? Cela tient à la méthode utilisée pour faire exploser la bonne torpille au bon moment. Un des postes, appelé « poste intérieur », placé en retrait de la ligne, sert à déterminer quelle torpille doit exploser. La mise à feu des engins étant électrique, l'opérateur connecte la partie du circuit concernée. L'autre poste, dit « extérieur », placé dans l'axe de la ligne, a pour mission de fermer le circuit au passage du navire visé. Les deux postes sont en liaison par télégraphe, téléphone et sonnettes.

Les deux bâtiments sont construits en maçonnerie de moellons et de briques et sont partiellement enterrés pour être moins visibles du large. Tous deux sont organisés en deux espaces : une chambre de veille avec les instruments et un local de vie pour loger le personnel, qui couche en hamacs (en France les défenses sous-marines sont du ressort de la marine).

Vue actuelle du poste intérieur et détail d'un des sabords de viséeVue actuelle du poste intérieur et détail d'un des sabords de visée

Vue actuelle du poste intérieur et détail d'un des sabords de visée

Vues intérieures du même poste : à gauche la pièce de vie, à droite la chambre de veilleVues intérieures du même poste : à gauche la pièce de vie, à droite la chambre de veille

Vues intérieures du même poste : à gauche la pièce de vie, à droite la chambre de veille

La ligne de torpilles de fond du goulet est remplacée par un barrage de mines sous-marines au large en 1911. Le poste extérieur a subi un bétonnage durant la Seconde Guerre mondiale, mais le poste intérieur est demeuré dans son état de la fin du XIXe siècle. Tous deux sont visibles depuis le sentier côtier, mais le poste de la pointe de Cornouaille est difficile d'accès.

P. Jadé

Sources :

Patrick Jadé , « Les armes nouvelles au secours de la fortification : les « défenses sous-marines » dans le goulet de Brest, 1868-1915 », Cahiers de l’Iroise, n° 202, mai-août 2005, p. 95-104

Service historique de la Défense, Vincennes, archives de la Marine (défenses sous-marines)

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