La fortification du XIXe siècle : connaître et partager
2 Mai 2019
Pour faire suite à notre précédent article sur la ruine des fours à boulets (et parce que notre dessinateur s'est soudainement pris de passion pour le sujet), un exemple original de four à boulets : celui du fort Cézon à l'embouchure de l'Aber Wrac'h.
Evocation de la tour d'artillerie du fort Cézon vers 1811 avec le four à boulets en contrebas, par Lionel Duigou
Construit vers 1808, le four à boulets du fort Cézon est d'un modèle différent des grands fourneaux à réverbère de type Meusnier observables ailleurs sur la côte. Il présente un certain nombre d'originalités, ce qui lui a valu de faire l'objet d'une feuille de dessin à l'occasion d'études sur le sujet en 1820, et donc d'être représenté sous toutes les coutures. Ce qui est heureux, car il a actuellement totalement disparu.
L'installation est de petite taille, le conduit intérieur permet un seul rang de boulets. L'introduction des boulets se fait par un petite ouverture circulaire sur le côté, disposition critiquée en 1820 ("cette ouverture d'entrée des boulets serait bien mieux placée au bout du canal parce qu'elle permettrait de voir dans la longueur de celui-ci pour le nettoyer", Service historique de la Défense, Vincennes, archives du Génie, 1 VR 109, Génie, Direction de Brest, Fourneau à rougir les boulets exécuté au fort Cézon, 10 juillet 1820). Le conduit de cheminée est coudé et étiré sur toute la longueur du four.
Un soin tout particulier est apporté aux organes de récupération des boulets rougis. Un ingénieux système de cuillère pivotante permet de prélever un boulet à la fois sans devoir aller le chercher à l'aide d'un crochet comme dans les autres modèles. Lorsque le canonnier appuie le manche de la cuillère vers le bas, cela soulève la planchette qui fait glisser le boulet placée sur elle entre les bras de la cuillère puis dans la goulotte en pierre. Lorsqu'il relâche le manche, la planchette retrouve l'horizontale et un nouveau boulet peut descendre en position de chauffe.
L'extrémité de la goulotte en pierre est percée, ce qui doit favoriser la récupération des boulets rougis, mais est considéré en 1820 comme "une mauvaise chose qui peut occasionner des accidens [sic]".
P. Jadé
Sources :
Service historique de la Défense, Vincennes, archives du Génie
André et Jacqueline Tiret, "Les fours à rougir les boulets construits en France entre 1793 et 1820", Archeam, n° 10, 2003, p. 42-46