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Association "1846"

La fortification du XIXe siècle : connaître et partager

Batterie de Sept (ou de Neuf, ou des Quatre-Fontaines, ou de Kerjean, ou de la Liberté), Brest

Ou de la difficulté de faire l'histoire des ouvrages qui changent de nom et d'implantation au cours de leur évolution.

La batterie des Quatre-Fontaines apparaît dans le dispositif de défense de la rade de Brest au tournant des XVIIe-XVIIIe siècles, d'abord à l'état de projet (par exemple dans cette carte de 1694 établie par Vauban) puis comme un ouvrage existant (ici en 1717). C'est alors la seule batterie sur la côte nord de la rade entre le fort du Portzic et la place de Brest. Elle est implantée sur la rive droite de l'embouchure d'un petit ruisseau côtier descendant des hauteurs de Saint-Pierre. Au cours du XVIIIe siècle (ici en 1747 et ici en 1778), elle est régulièrement mentionnée armée de 7 canons de 36 livres, dont elle tire probablement son autre nom de "batterie de Sept" ou "des Sept" [canons]. Elle est parfois aussi appelée "batterie de K[er]jean", du nom du hameau situé non loin en retrait de la côte (dit aussi "K[er]vizian", actuellement lieu-dit "Kervichen"). Son aspect, connu par un document sans doute daté des années 1740 et d'un autre de 1811, est celui d'une batterie à parapet gazonné à embrasures (au nombre de 7) sur un soubassement en maçonnerie. Un petit magasin à poudre est implanté à sa droite.

Localisation de la batterie de Sept sur le plan-relief (1807) de Brest. Le nord est à gauche (cliché O. Doher)

Localisation de la batterie de Sept sur le plan-relief (1807) de Brest. Le nord est à gauche (cliché O. Doher)

La batterie de Sept sur une carte de 1777. Le nord est à droite (© Service historique de la Défense)

La batterie de Sept sur une carte de 1777. Le nord est à droite (© Service historique de la Défense)

Plan et coupe de la batterie de Sept au XVIIIe siècle. Le nord est en haut (© Service historique de la Défense)

Plan et coupe de la batterie de Sept au XVIIIe siècle. Le nord est en haut (© Service historique de la Défense)

Plan de la batterie de Sept au début du XIXe siècle (1811). Le nord est en bas (© Service historique de la Défense)

Plan de la batterie de Sept au début du XIXe siècle (1811). Le nord est en bas (© Service historique de la Défense)

[Est ce qu'on pourrait se fixer une fois pour toute sur l'orientation des documents ?   - merci]

La coexistence de plusieurs dénominations d'un même ouvrage peuvent être source de confusion, y compris dans les documents anciens (par exemple sur cette carte du XVIIIe siècle qui figure deux fois la batterie de Sept sous deux noms différents - en contradiction avec le reste du corpus documentaire). Mais ce n'est pas fini, car sous l'Empire l'ouvrage est appelé "batterie de Neuf" tandis que son armement passe à... 9 pièces de 36 livres. Une batterie haute armée de mortiers semble également présente à cette époque (visible notamment sur le plan-relief). Un état non daté mais postérieur à 1805 mentionne lui une "batterie de la Liberté" située entre Brest et le Portzic et armée de 9 canons de 36 livres, qui semble bien correspondre à la batterie de Sept Neuf.

La batterie de Sept sous le nom de "batterie de Neuf" sur une carte de 1870 (© Service historique de la Défense)

La batterie de Sept sous le nom de "batterie de Neuf" sur une carte de 1870 (© Service historique de la Défense)

Ce nom de "batterie de Neuf" est celui qui continue à être utilisé pendant la majeure partie du XIXe siècle (dans le cadastre napoléonien, le rapport de la commission de défense des côtes de 1841, ou sur la carte de l’État-major, par exemple), sauf à partir de la fin des années 1870 quand le nouvel ouvrage qui remplace l'ancien reprend son nom de "batterie de Sept".

Plan d'ensemble de la batterie de Sept et de la jetée des Quatre-Pompes vers 1900 (© Service historique de la Défense)

Plan d'ensemble de la batterie de Sept et de la jetée des Quatre-Pompes vers 1900 (© Service historique de la Défense)

Cette fois, ce n'est pas seulement le nom qui change, mais l'implantation : le site de l'ancienne batterie sur la rive droite du ruisseau est abandonné au profit de la rive gauche (vous suivez ?). La nouvelle batterie, prévue pour quatre canons de côte rayés de calibre 32 cm, est construite  de 1877 à 1879 par l'entrepreneur Tritschler (l'antenne brestoise du SHD en conserve les attachements dans le fonds Z). Elle se compose de quatre plates-formes séparées par des traverses-abris, et d'un magasin à poudre terrassé, plus une maison de gardien.

La batterie de Sept en 1879 (© Service historique de la Défense) et en 1919 (© Brest Métropole)
La batterie de Sept en 1879 (© Service historique de la Défense) et en 1919 (© Brest Métropole)

La batterie de Sept en 1879 (© Service historique de la Défense) et en 1919 (© Brest Métropole)

La batterie de Sept est désarmée au cours de la Première Guerre mondiale, sans que ses pièces, d'un modèle déjà ancien, ne soient démontées et envoyées sur le front. Ni la batterie des XVIIe-XVIIIe siècles ni celle du XIXe siècle ne subsistent de nos jours. 

Il y a cependant toujours une "batterie de Sept" dans la toponymie de la base navale de Brest...

P. Jadé

Sources :

Service historique de la Défense, département Armée de Terre, Vincennes, archives de l’État-major de l'Armée.

Service historique de la Défense, département Armée de Terre, Vincennes, archives du Génie

Service historique de la Défense, département Armée de Terre, Vincennes, archives de l'Artillerie.

Service historique de la Défense, département Marine, Vincennes.

Service historique de la Défense, département Marine, Brest.

Bibliothèque nationale de France.

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